Mardi 01 Août :
Deux heures et demi d'attente à l'Ambassade de l'Inde dans une salle remplie d'Iraniens pour qui attendre son tour signifie chacun pour soi.
Au final, jeu de coudes, poussettes, injures et surtout refus des dossiers à cause d'une banale lettre de recommandation qui, aux dernières nouvelles, ne semblait pas nécessaire.
Je dois admettre qu'une certaine crispation n'était pas invisible.
Demain, ce sera une autre histoire, assurément.
Mercredi 02 Août :
Ambassade de l'Inde : deuxième.
Cette fois-ci, les choses se passent en notre faveur.
Nous y entrons tels des taurillons, tête baissée et le regard devant, comme si personne n'avait d'autorité sur nous.
Résultat : demande de visas acceptée et rendez-vous dans une semaine.
Nous finissons la matinée au bazar où les Tamarillos et les Epines vinettes séchés ne demandent qu'à être goûtés.
Jeudi 03 Août :
Nous partons à la recherche de quelques palaces situés au nord de la ville dans les beaux quartiers.
Quelle désillusion !!!
Façade d'immeuble de cité,
hôtel standard, l'équivalent d'un deux étoiles en France.
Décidément, ce n'est pas aujourd'hui
que notre travail de détective va porter ces fruits.
Vendredi 04 Août :
Nous nous arrêtons par hasard dans
un minuscule laboratoire situé dans une ruelle perdue.
Qui a dit que la curiosité était un vilain défaut ?
Nous découvrons avec stupeur la conception du Shuné, la galette de blé dont tous les Iraniens raffolent ; et il y a de quoi !
Le plus remarquable est la façon dont ils cuisent cette galette; ils collent la pâte contre les parois d'un four arrondi chauffé au feu de bois.
Le résultat est étonnant : finesse, croquant et moelleux à la fois.
Enfin !!!
Samedi 05 Août :
Après recommandation, nous prenons d'assaut le restaurant "Alicabu" pour y découvrir enfin la gastronomie locale qui est, dois-je le rappeler, un des buts essentiels de notre voyage.
Serveurs en costume, chanteurs, danseurs, ambiance folklorique, fresques, tapis ; en tout cas, le cadre donne envie.
En tant que bons détectives culinaires, nous choisissons un mixe de quatre plats.
Au finale : riz safrané, riz à l'aneth, frites, poulet, agneau, veau.
La quantité y est mais la créativité est absente ; dommage !
Mercredi 09 Août :
Nous quittons enfin Téhéran après une semaine de disette pour Ispahan, ancienne capitale sous l'époque des Chahs d'Iran.
Six heures de bus pour retrouver, on l'espère, de l'agréable et voir ... des gastronomes ?
Jeudi 10 Août :
Une ville nous attend. Un bazar nous attend. Des arts de la table nous attendent.
Il est 9 h et la brillance de l'or fracasse la rétine dans cet ex-palais des dignitaires iraniens. Un travail de verrerie, de métaux précieux, de peintures sur céramique, de services à thé , de plats et autres assiettes qui ferait pâlir plus d'un sage limougeot, maître de son art.
Le soir, un repas sur tapis s'offre à nous, encore dans ce lieu, le premier de la sorte, plaisir de courte durée car un mal à l'aise corporel s'installe rapidement, les genoux en pâtissent trop, le dos aussi. Nous mangeons des plats cuisinés trop rapidement. Dommage.
Puis, nous nous retrouvons sur une terrasse avec vue, brume de pommes et thé sucré sur la langue et un dialogue en français. "Capalest", un couple de charentais qui parcourt le monde pendant 1 an jusqu'en Nouvelle-calédonie. Le sommeil s'annonce bien, manque de l'action en barre.
Samedi 12 Août :
Le bus, encore le bus, 18 h pour rallier Zahédan, notre destination finale en Iran.
Dimanche 13 Août :
Nuit difficile, réveil difficile, il est cinq heures du matin, nous sommes à Zahédan.
Reffoulés à cinq reprises, nous posons nos sacs dans un hôtel qui accepte les étrangers.
Pressés par le temps, nous partons en suivant au consulat Pakistanais situé à 500 mètres mais stupeur, prévenue par l'hôtel de notre parcours, une escorte de deux policiers armés nous rejoignent. Leur explication est simple, en deux mots, " Zahédan danger ".
Ben voyons !
Nous arrivons les premiers, une bonne chose.
Nous voici au guichet, heureux de pouvoir bientôt fouler le sol pakistanais quand la phrase qui tue retentie " It's not possible ".
Les bras nous en tombent.
Le problème est simple : nous n'avons pas de lettre de recommandation du consulat Français à Téhéran et nous savons que la France refuse de la donner donc pas de lettre, pas de visa.
La solution est aussi simple : repartir sur Téhéran en bus puis prendre l'avion pour l'Inde, Bombay ou New Delhi.
Pour résumer, nous mettons une croix sur le Pakistan, nous nous farçissons 24 h de bus jusqu'à la Capitale et nous prenons un vol à deux cents cinquante euros le billet.
La situation est désespérante mais bien réelle.
Plus tard, nous rencontrons le directeur d'une agence de voyage aux relations plutôt intéressantes, il comprend notre désarroi et décide de nous aider.
La situation semble changer de camp, demain sera un autre jour.
Lundi 14 Août :
Nous partons donc à la première heure avec notre ami au consulat avec un maigre espoir mais un espoir quand même car il faut toujours croire en ce que l'on fait.
C'est notre dernière chance.
Le verdict est rapide, après trois minutes de dialogue gestuel, aucun visa ne sera attribué sans lettre de recommandation de Téhéran.
Effondré, dégoutté, écoeuré, abattu, je ne sais quel mot utiliser pour décrire le moral de la RDS à ce moment.
Nous voici repartis pour la capitale, la tête ailleurs, l'envie de rien.
Mardi 15 Août :
Aéroport de Téhéran, nous apprenons avec effroi que l'obligation nous incombe d'acquérir un billet aller/retour afin de quitter le pays, loi oblige ; le prix n'en est que plus élevé.
Notre galère subsiste mais que faire ?
Passer en Afghanistan ? Trop risqué en ce moment.
Au bout de trois heures d'acharnement et un aéroport plus loin, nous trouvons miraculeusement un vol en partance pour Bombay avec escale à Doha.
Soulagés que cette péripétie s'achève, nous filons pour l'Inde avec quand même un petit pincement au cœur.
C'est la fin du calvaire Iranien, place au défi Indien.
C'est ça aussi la magie du voyage !
Mercredi 16 Août :
Bombay, 05h00.
Une pluie fracassante inonde les rues, c'est la dernière ligne droite de la mousson.
Un taxi et nous sillonons les quartiers ; le temps s'arrête quelques minutes, la misère est la, paisible.
Des corps entassés, des visages, des regards, une odeur inhumaine, une vision apocalyptique de la chose nous glace le sang.
Certes, mais Bombay c'est aussi cette couleur verte dominante de part ces arbres incalculables, ces taxis à trois roues, ces vaches sacrées et cette population à l'allure si distinctive, comme dans tous le pays me diriez-vous.
Nous voici installés et décrassés, attention faîtes place, la RDS est dans les starting blocs.
Enfin, les choses sérieuses reprennent, l'effervescence est à son comble, la motivation aussi.
A table !
A suivre ...
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